Etape 2 Championnat de France N2 zone 2

En 2015/2016, j’étais coach de l’équipe de Roller Derby de Perpignan. J’envoyais un récap de chaque match sur le groupe Facebook de l’équipe. Ci-dessous, un exemple de ces récaps

Aréoport de Nice, deux minutes d’arrêt !

Nous partons samedi matin de Perpi pour un premier match à 15h, contre les Toxic Ladies de Toulon.

Difficile de jauger cette équipe, qui a un match de retard sur les autres (comme nous) et une défaite « surprenante » contre les Rabbit Skulls, dans un dernier match de fin de journée que nous n’avons pas vu en fin d’étape 1. 

Le match des Toxic que nous avons vu nous a laissé un goût de « ouah, leur grande jammeuse faire des dégats » 

D’autre part, je connais CKteur, leur coach, pour avoir reffé les Toxic et pour l’avoir vu jouer en match mec. 

Je sais qu’il est très calme, très posé, qu’il voit très bien ce qu’il se passe sur le track et qu’il saura très bien changer son fusil d’épaule en quelques jams en fonction de ce qu’on leur propose. 

La stratégie est la suivant : « impact, paralysie, neutralisation »

Le but est de faire un match de bloqueuse, avec un pack inerte, très peu de points marqués, et des jammeuses complètement scotchées derrière la ligne. 

En mettant deux joueuses très stables en B1 et B4, et en demandant à la jammeuse de venir boucher le passage entre B2/B3. Je demande aux jammeuses de passer outre la vanité d’aller chercher des points, chose qu’on ne fera qu’à condition d’avoir des powerjams ou de recycler la jammeuse adverse.

Les jammeuses de première mi-temps seront Jo, Lisa et Iron pour leur capacité à bien bloquer.

Le pep talk est orienté sur la gagne pour la gagne, et pas pour éviter de perdre. Ce jeu est important, on laisse les problèmes derrière et on s’engage dans un weekend de pur Derby, on laisse les gosses, les maris, et les problèmes de boulot sur le bord du track. 

[Match 1 contre les Toxic Ladies]

Coup d’envoi, tout se passe assez bien, la stratégie fonctionne. Petit à petit, chaque équipe mets ses points, l’écart est plutôt en faveur des Toxic, mais jamais de plus de dix points. 

Incidieusement, et sans que je m’alarme, les fautes de définition de pack tombent, des deux côtés. Au bout de 20 minutes de jeu, nous avons remonté le score et dépassé les Toxic, 55-54. 

A l’évidence, CKteur a compris plus vite que moi qu’en arrêtant les fautes de définition de pack, leurs joueuses resteront sur le track et prendront l’avantage. Concours de circonstance, nous prenons un powerblock contre Blackout, qui nous fait perdre 30 points d’un coup. 

Je n’ai toujours pas compris qu’il fallait arrêter les « destruction de pack » et les « failure to reform » 

Chacun tente son petit miracle d’une manière désordonnée, les lignes sont perforées de part en part, chacun joue perso, dans la pagaille, nous prenons 80 points dans la vue en 8 minutes. 

2 minutes avant la fin de la première période, je finis par réagir et je demande aux lignes d’attendre derrière et pas en limite de pack avant, puisqu’à l’évidence, personne ne fait les ponts et que les failure to reform continuent de pleuvoir.

Ca fonctionne immédiatement, la dernière ligne contient parfaitement la dernière jammeuse et nous partons à l’extérieur débriefer pour la mi temps.

59-135, 76 points d’écart

Forcément, je gueule un peu, je râle sur les histoires de pack parce qu’à ce moment là, je n’ai pas compris que c’est bien moi qui n’ai pas vu assez tôt que nos réflexes de tirer le pack devant n’est pas compatible avec cet arbitrage très ferme (et très juste) sur la définition de pack. 

Le tableau des fautes est noir, on ne peut plus se permettre d’en prendre.

On prend le temps de la réflexion, on convient d’attendre derrière la ligne adverse pour avoir 2x3m pour bloquer, et que ça aidera tout le monde à avoir quelques secondes de plus pour former les ponts.

Retour sur le banc, début de la seconde période, notre jeu est là. 

Les lignes sont propres, nous prenons beaucoup de lead, beaucoup de 4-0. pendant plus de dix minutes, nous réduisons l’écart laborieusement à coup de 4-0. Leur jammeuse est toujours sur nos talons, nous n’arrivons pas à les recycler et à capitaliser sur nos leads en faisant plus que 4-0 à chaque fois, mais l’esprit est de retour.

A tel point qu’à Nat qui revient hilare de jammer, je dis « efface moi ce sourire, je veux voir la peur dans tes yeux jusqu’au bout ! » . Comme a dit Iron à ce moment là : « Va pas nous la vexer ! » 🙂

Une faute de jammeuse plus tard, elles rattrapent l’avance qu’elles avaient perdu, et nous jouons à ce jeu familier jusqu’à la fin du match : 4 lead à 4-0 pour nous, un powerjam à 20-0 pour elles.

Score final : 145-224, 79 points d’écart, soit 3 de plus qu’à la fin de la première période. 

Clairement, leur supériorité a été sur la réactivité à l’arbitrage que je n’ai pas eue, et leur capacité à capitaliser sur leurs leads, moins nombreux que les notres, parce qu’elles savent recycler nos jammeuses et qu’elles ne font pas de fautes de jammeuse.

Objectifs non atteints, jammeuses trop nombreuses en prison, match perdu.

[Match 2 contre les Pisseuses Maléfiques]

Les Pisseuses sont huit, elles ont un mental incroyable, un niveau individuel moyen plus élevé que le notre (ça je l’ai pas dit dans le vestiaire 🙂 ) et ont un super coach avec un vrai mental « famille » comme le notre. 

Elles n’ont rien à perdre, elles sont là pour s’amuser, et tout ce qu’elles prennent comme point, c’est du bonus pour elle.

Ce qui les rend très dangereuse, j’annonce que je ne veux pas qu’on les aie à l’usure, une fois qu’elles sont fatiguer, il faut leur offrir un match digne, et pas en jouant sur les foul out ou leur épuisement et creuser l’écart à la fin.

Notre objectif est double. Comme monsieur Jourdain, on joue contre Aix sans le savoir. Aix les a battues avec 236 points d’avance, c’est cette différence de points qui sera notre objectif secondaire, en plus d’avoir gagné le match.

Le match démarre et notre stratégie fonctionne bien. La première mi-temps se passe plutôt bien, elles sont rarement 4 sur le track, et malgré leur niveau, nous les tenons bien. Cependant, l’écart au score ne décolle pas avant la dixième minute, où tout s’enclenche, et nous finissons la première période à 152-37, soit 115 points d’avance, très près de la moitié de l’objectif du match. 

A la mi-temps, j’annonce qu’elles vont se fatiguer, qu’elles vont être moins propres dans leur jeu et que l’erreur serait de se laisser emporter individuellement et d’aller à la faute. Nous avons atteint la moitié de l’objectif en 20 minutes, il reste une mi temps complète pour multiplier l’écart par deux. 

Retour sur le track, premier jam, illustration par l’exemple de ce qu’on cherche à éviter. Vio jamme, passe le pack, et Daria passe par l’exter à toute vitesse et envoie un coup d’épaule très haut dans la gueule de Vio qui s’effondre direct. Daria part en box pour High Block, Vio rampe à l’exterieur du track alors que je lui dis d’y rester pour faire arrêter le jam, finit par se relever, et part « se venger » sur le pack qui ne lui a rien fait. Elle prend une misconduct, et rejoint Daria en box. Ca call, les refs parlementes et finissent par exclure Daria pour Gross Misconduct. 

Je donne les instructions : « on ne joue pas à ce jeu là, si vous prenez un mauvais coup et qu’il vous laisse par terre, ne sortez pas du track, restez y et on arrêtera le jam » 

La tension redescend, l’écart aux points augmente, pas assez vite mais il augmente. 

Après ma connerie en premier match, c’est à Jérome d’en faire une, il aligne Camille comme jammeuse, alors qu’on est en retard sur l’objectif.

Face à des joueuses comme les Pisseuses, elle va se faire bouffer toute cru et nous prenons une leçon de stratégie.

Départ de jam, la jammeuse adverse prend le lead facilement, et les bloqueuses poussent Camille à la faute. 

Camille part en box, la jammeuse adverse marquent ses points (beaucoup) en gardant un oeil sur Camille. Jammeuse débout, elle call.

Départ de jam en powerjam, elle passe, prend le lead, camille finit par revenir, se faire recycler et cut. Retour en box. Camille se lève, prête à partir, la jammeuse call. 

Troisième jam de suite pour Camille qui est plus en box que sur le track, la jammeuse prend facilement le lead en powerjam, Camille retourne sur le track sous mes « pas de faute, hein, pas de faute ! » prend très bien son initial pass pendant que les Pisseuses regardent ailleurs, et ça finit par caller.

Bilan, 3 powerjam, je ne sais pas combien de points, mais beaucoup, ça fait cher la connerie (mais moins cher que mes 80 points de premier match, hein Jérome, la plus grosse, c’est moi qui l’ai faite 🙂 )

Le match se termine, presque toutes les Pisseuses sont hot mais maitrisent parfaitement leur jeu, aucune n’est foul out. 

Score final 269-101, 178 points d’écart, match gagné, mais objectif pas complètement atteint.

[Match 3 contre les Head Hunters]

Gonflées à bloc par la victoire précédente, nous sommes cependant fébrile à l’idée de rencontrer Narbonne. Elles viennent de se prendre 138 points d’écart par les Toxic, et ça sera notre objectif pour effacer l’épisode de la veille. Leur mettre le même écart de points que les Toxic. 

Nous savons comment elles jouent. Tout physique, borderline, cracra, méchant. Le but est de résister avec notre jeu, pas le leur. On joue « famille », on joue « ligne », on joue « équipe », on joue « cohésion » 

Je fais mon petit sketch pour expliquer ce qui est probablement en train de se dire dans l’autre vestiaire : « nos meilleures sont meilleures que leurs meilleures, faites en une affaire personnelle, prenez en une chacune et minez leur le moral, sur le long terme, ça sera payant et elles vont s’énerver » 

A cela, je dis qu’il faut répondre par des lignes propres, par des présentations de dos, que les mauvais coups vont tomber mais qu’il ne faut pas y répondre, que ce sera long parce que les refs vont mettre un moment à s’habituer à voir les mauvais coups, mais que s’ils sont récurrents et toujours du même côté, ça finira par tomber et décimer leurs lignes. 

Ravalez votre fierté et attendez que ça passe. On pense « équipe » !

Coup de sifflet de départ, nous prenons rapidement 30 points d’écart qui se transforment en 53 points de différence à la mi-temps. 

Mais nous subissons leur jeu. Nous prenons beaucoup de fautes, le tableau est noir alors qu’elles ne prennent rien ou presque. Beaucoup de High Block, beaucoup de Multiplayer, beaucoup de Back block ne sont pas sifflés de leur coté à mon avis. On se concentre, on ne se laisse pas abattre. Elles nous tapent fort, nous prenons des powerblock, mais malgré tout nous continuons de creuser l’écart, mais sans vraiment s’amuser. 

A la mi-temps, nous sommes toujours stressées, nous savons que rien n’est joué, 95-42, c’est rien, c’est un peu moins que la moitié de l’objectif, il nous faut imposer notre jeu, ce qui passe par une ligne plus ferme et plus hermétique. 

Reprise, la fatigue et l’habitude des refs font qu’elles sont plus sifflées, et nos joueuses ne prennent presque plus de fautes. A 4 à bloquer, leurs jammeuses restent coincées derrière, à tel point que la 90 passe en bloqueuse, à la fois pour aller faire des trous dans notre défense, et pour recevoir des starpass. Elles ont renoncé à prendre les leads et essayent de limiter la casse avec des starpass pour forcer les 0-0.

Nous jouons jusqu’au bout, Nat découvre les joies de la feinte et du passage en douceur, jusqu’au dernier jam.

Je passe sur les dix points qui manquent, le vrai score est 231-101 soit 130 points d’écart (on peut dire que l’objectif est atteint)

le score retenu en raison du calcul mental approximatif des trois personnes qui ont relu la feuille du scorekeeper est 221-101.

[conclusion]

Les dix points en question nous font passer en 3ième position sur le championnat juste derrière les Toxic, toutes les équipes ayant joué le même nombre de matches. (en vrai on est toujours 2eme)

Nos défauts sont clairs : Il faut qu’on apprenne à recycler les grosses jammeuses, on y arrive avec les narbonnaises, mais ça n’est pas suffisant.

Il faut que notre définition de pack soit irréprochable, elle nous coûte un match et de nombreux points.

Le reste m’a l’air très bien, on va même avoir le temps de revoir des stratégies ! 🙂

Bravo à toutes, supporters compris, c’était vraiment des super matches et un super week-end.

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